Le scénario économique actuel présente une divergence entre le comportement des indices boursiers et les fondamentaux macroéconomiques. Suite à la récente décision de la Réserve fédérale (Fed) et à la publication de nouvelles données sur l’emploi, une analyse technique de l’impact de la politique monétaire sur les différentes classes d’actifs et de la probabilité d’un changement de cycle est indispensable.
Ci-dessous sont détaillés les points clés pour comprendre la situation actuelle et les projections pour l’exercice 2026.
1. Contexte actuel : La Réserve Fédérale et la réaction du marché
La Fed a procédé à une baisse des taux de 25 points de base, situant la fourchette cible entre 3,5 % et 3,75 %. Cette décision, la troisième de l’année, n’a pas été unanime, comptant trois votes dissidents au sein du FOMC, ce qui reflète la complexité de l’équilibre entre inflation et croissance.
La réaction immédiate du marché a été disparate selon les différentes classes d’actifs :
- Actions (Small-caps) : L’indice Russell 2000 a atteint de nouveaux sommets historiques, dépassant les 2 531 points. Cet indice, composé de sociétés à petite capitalisation, est très sensible à la dette. Une baisse des taux réduit leurs coûts de financement, propulsant leurs valorisations.
- Matières Premières : L’argent prolonge sa dynamique haussière, marquant un record au-dessus de 60 $(atteignant 61,59$).
- Crypto-actifs : Le Bitcoin montre de la volatilité dans la zone des 92K$-94K$, soutenu par une forte demande institutionnelle (les ETF Bitcoin ont enregistré des entrées nettes de 152 millions de dollars).

Cependant, l’économie réelle montre des signes de fatigue : les offres d’emploi aux États-Unis ont stagné à 7,7 millions en octobre et les petites entreprises signalent des hausses de prix de 34 %, mettant en évidence une pression inflationniste persistante.
2. Dynamique entre Taux d’Intérêt et Marché du Travail
Pour la prochaine réunion de la Fed (28 janvier 2026), le consensus du marché (77 %) anticipe un maintien des taux, contre 23 % qui parient sur de nouvelles baisses. Le facteur déterminant n’est plus seulement l’inflation, mais la protection du marché du travail.
La fonction des baisses de taux
Il est fondamental de comprendre la théorie économique derrière ces décisions. Une baisse des taux agit comme un stimulus monétaire pour réactiver une économie en ralentissement. Le cycle économique récessif suit généralement cette séquence :
- Ralentissement économique.
- Diminution de la consommation et de la demande.
- Réduction des bénéfices des entreprises.
- Augmentation des licenciements (hausse du chômage).
- Contraction plus importante de la consommation.
La Fed baisse les taux pour briser ce cercle vicieux, rendant l’épargne moins attractive et encourageant l’investissement en capital dans de nouveaux projets nécessitant de la main-d’œuvre.
Le chômage comme indicateur avancé
Il existe une corrélation historique critique : le taux de chômage fonctionne comme un indicateur avancé des baisses de taux. Lorsque le chômage commence à augmenter fortement, les banques centrales initient le cycle de baisse.

Comme on peut l’observer sur le graphique, le point d’inflexion où le chômage cesse d’augmenter coïncide souvent avec la réduction agressive des taux d’intérêt. Actuellement, les données suggèrent le début d’un cycle d’ajustement du marché du travail qui pourrait forcer la Fed à poursuivre les baisses.
3. Corrélation Historique : Baisses de Taux et Marché Boursier
Il existe une croyance erronée selon laquelle une baisse des taux implique automatiquement une hausse soutenue de la bourse. Bien qu’à court terme cela puisse générer de l’optimisme (surtout pour des indices endettés comme le Russell 2000), à moyen terme, les baisses de taux précèdent souvent des corrections de marché si elles coïncident avec une récession.
Historiquement, des chutes boursières coïncidant avec des cycles de baisses de taux ont été enregistrées au cours des années : 1960, 1970, 1975, 1980, 1990, 2000, 2008 et 2020.

4. Analyse des Devises et Valorisations (Ratio P/E)
La politique monétaire de la Fed a un impact direct sur le marché des changes (Forex). Face à une baisse des taux aux États-Unis (et en supposant une stabilité de la BCE), le dollar a tendance à s’affaiblir face à l’euro.
- Tendance EUR/USD : On observe un renforcement de l’euro. Historiquement, des niveaux de EUR/USD > 1,20 ont représenté des points stratégiques pour l’acquisition de dollars dans une optique d’investissement à long terme.

Valorisations du S&P 500
D’un point de vue fondamental, le marché américain présente des valorisations exigeantes. Le Ratio P/E (Price-to-Earnings) se situe actuellement au-dessus de 27. Statistiquement, lorsque ce ratio dépasse le niveau de 23, les années suivantes ont tendance à offrir des rendements plats ou négatifs.

5. Conclusions et Perspectives Stratégiques
Sur la base des données exposées, le scénario pour 2026 suggère prudence et sélectivité.
- Risque de Récession : La priorité de la Fed sur le marché du travail indique une préoccupation concernant une possible récession technique ou un atterrissage brutal de l’économie.
- Liquidité : Dans des environnements de ratios P/E élevés et de possible correction des bénéfices, la préservation du capital et la liquidité deviennent prioritaires pour saisir les futures opportunités.
- Sélection d’Actifs : L’investissement rationnel dans ce cycle favorise les entreprises avec une croissance des bénéfices constante et des bilans sains, en évitant les sociétés aux valorisations excessives ou aux bénéfices décroissants.
- Flux de Capitaux : Malgré les corrections possibles, les États-Unis continuent d’attirer le capital mondial et l’industrie (au détriment d’autres zones comme l’Europe), ce qui maintiendra l’intérêt pour les actifs nord-américains à long terme, surtout s’ils sont acquis à un taux de change favorable et après des corrections de marché.
En résumé, bien qu’à court terme l’inertie haussière puisse se maintenir, les indicateurs macroéconomiques signalent la nécessité d’une posture défensive face à la volatilité attendue pour le prochain exercice.


